Juliette FECK
Juliette Feck, jeune artiste plasticienne, mène une réflexion autour d’une approche qui décontextualise les formes du réel et occulte la fonction initiale de l’objet. Un aspect géométrique extrait du quotidien émerge ainsi de la terre, matière que l’artiste aime à exploiter.
Dévoilant la violence de la réalité avec une certaine contemplation, le travail de Juliette Feck donne à voir les restes d’une violence qui résonnent comme un traumatisme enfoui. Son projet prendra la forme d’objets en terre cuite semi immergés au fil de l'Eure. Images d'histoires oubliées au fil de l'eau et du temps, elles révèleront dans vos promenades nocturnes leur aspect fantomatique.
Blog : juliette-feck.blogspot.fr
« Depuis mon arrivée à la Villa Calderon j'ai travaillé sur de nombreux projets, j'ai perdu des pistes, gagné des certitudes le doute, étant la permanence de la création.
Au début il m'a fallu reconsidérer mes attirances et mes envies. Il faut savoir que dans le cadre d'un diplôme on se dirige vers une voie sans pour autant écouter en profondeur à l'intérieur de soi. J'ai donc recommencé quelque chose même si ces nouvelles ouvertures n’avaient pas encore de cohérence entre elles. Concrètement je me suis rattachée à l'exposition des diplômés "hyper maintenant" pour officialiser ces nouvelles pistes encore un peu vacillantes ce qui fut une expérience assez concluante. J'y ai présenté "Boue Rouge" et "Gas". "Boue Rouge" était une pièce assez géométrique en terre rouge crue peinte en gris. Elle semble une forme convenue qui suggère l'ornement, le béton. Ce semblant de matière induisait le spectateur en erreur. La pièce de 100/140 cm était positionnée au sol entre deux espaces d’exposition ainsi le spectateur pour passer d'un espace à l'autre pouvait soit l'enjamber difficilement soit marcher dessus et la casser. Celui-ci se trouvait dans le rôle de l'acteur car c'est son comportement qui induisait la forme définitive de l'œuvre.
L'autre pièce "Gas" était un triptyque photographique placé sur un socle rouge de 51/51/150 cm. Les photographies représentaient des vitres explosées d'une usine désaffectée. Le titre fait référence à une peinture de Hopper qui représente une station essence perdue dans la campagne.
Après cette exposition je me suis mise à travailler sur la contre-forme que "Boue Rouge". J'ai à présent huit pièces qui par leur répétition donne le sentiment de quelque chose de connu. On se demande si cette forme existe vraiment, elle révèle son aspect mystique, devient un blason, un signe.
A partir de là vient une conscience de l'envie profonde de travailler sur les signes, la difficulté est de rendre visible le sentiment d'étrangeté d'un signe familier, de quelque chose de convenu. Comment extraire une forme et tout en gardant son intégrité lui conférer l’étrangeté que je ressens face à celle-ci ?
Dans cette période de doute et de perdition j'ai décidé de partir deux semaines afin d'y voir plus clair, d'affiner ma pensée. J'ai trouvé à Marseille et à Valence grâce à mes investigations photographiques des réponses. Des choses me sont parues plus évidentes. Mon travail continuait bien dans une continuité naturel, il n'était pas en train de se perdre dans quelque chose de lointain et d'absurde. Il avait seulement gagné de la distance, de l'ironie, un regard acéré sur le monde des hommes. C'est à ce moment que je vous ai envoyé le projet de la "Traversé du Béton". Le rôle de la trace et de la chose enfouie avaient retrouvé leur juste place dans mon travail tout en s'étend enrichis d'un jeu ». (Juliette Feck, Avril 2013).